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YESTERDAY'S NEWS |48
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Christopher interpella sa fille, lui rappelant une "proposition" à laquelle elle devait réfléchir. De quoi s'interroger. Tyler ne s'en faisait pas vraiment, mais ça l'intriguait. Ou peut-être était-ce du à l'atmosphère qui se dégageait de cette journée ? De ces gens ? De tout ça ? "Je l'espère aussi. Casey m'a beaucoup parlé de vous, et j'admets que j'ai envie d'en savoir plus." répondit Tyler le plus amicalement et détendu possible. Il feignait d'être à l'aise et visiblement sa mascarade avait l'air de fonctionner. Mais pendant combien de temps ? Heureusement la question ne se posa pas puisqu'il partit dans la maison en compagnie de Casey.
"Cette Mia a l'air d'un sacré numéro... et... non rien." répondit Tyler alors qu'ils quittaient le salon pour se diriger vers l'étage. Il ignorait si la remarque de Casey avait un quelconque sous-entendu indécent - la connaissant, probablement oui - mais bizarrement Tyler ne pensait plus à ça. Il était trop tendu - et pas de la meilleure des façons - pour penser à ce qu'ils faisaient en général dans les chambres - enfin... pas que dans les chambres au final. Même si Casey était toujours aussi resplendissante, Tyler était trop préoccupé. En fait il ne savait pas trop ce qu'il faisait là. Mais le problème ce n'était pas tant les fiançailles ou la rencontre avec les parents de Casey. C'était plutôt le fait que ce soit une fête une famille. Tyler n'avait pas de frères et sœurs, il n'avait pas eu de père et il avait à peine eu une mère. La famille c'était un concept parfaitement abstrait pour lui. Il se sentait donc d'autant plus perdu dans cet environnement. "Casey Griffith ! Du papier à fleurs, des posters de pop-stars, des peluches... t'étais une vraie petite fleur bleue en fait !" s'exclama Tyler en laissant un petit rire lui échapper. "C'est donc ici que la petite Casey Griffith rêvait au prince Charmant... c'est trop mignon !" Un petit rire et puis il s'asseyait sur le bord du lit en soupirant. C'était étrange de se retrouver dans la chambre d'adolescente de Casey. Il avait impression que c'était si... intime. Sentiment perturbant. "Alors, comment je m'en sors ?" lâcha t-il en esquissant un maigre sourire et en se mettant à nouveau à triturer son nœud de cravate.
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Il rencontrerait bien assez tôt la grande sylphide brune qui servait de belle-sœur à Casey - à savoir pourquoi madame se faisait désirer, d'ailleurs, même si ça les arrangeait plutôt, pour le coup. En attendant, il pouvait faire connaissance avec l'immense majorité de ce qu'il restait de souvenirs à la jeune femme. Tout ce qui avait constitué son enfance entre ses murs était essentiellement concentré dans cette pièce, que malgré l'insistance déplacée de Mia - oui, encore elle -, Rose avait conservé dans l'état exact où sa fille l'avait laissé avant de s'engager dans l'armée. Une douce nostalgie l'envahit, loin des pensées lubriques que leur isolement dans la chambre aurait pu lui inspirer. Les pyjamas-parties avec Sonja, les nuits blanches à bâcler un devoir pour le lendemain auquel elle avait préféré une soirée sur la plage avec ses amis, les heures passées devant le miroir de sa penderie à se demander si ce short la grossissait ou non ... Difficile à croire quand on la voyait et pourtant, la brune avait bel et bien été ce genre de nanas. Du moins, jusqu'à environ seize ans, lorsqu'elle avait compris qu'elle se moquait du regard des autres. En somme, elle pouvait se réjouir d'avoir eu une enfance et une adolescence heureuse, contrairement à beaucoup. Contrairement à Tyler. Il n'avait guère été bien loquace sur le sujet, toutefois, les bribes qu'il lui avait confié donnait une petite idée des difficultés qu'il avait traversé. « Pas le Prince Charmant ! Encore mieux ! Justin Timberlake ! » s'exclama-t-elle avec emphase en lui présentant le poster quelque peu décoloré par le temps du chanteur, toutes mèches blondes et pose de beau gosse dehors. Un vrai piège à filles. Dix ans plus tôt, en tout cas. « Il a alimenté tant de mes fantasmes ... » soupira-t-elle avec une emphase feinte tout en se laissant à son tour tombée sur le lit. Erreur. Avec cette maudite robe trop serrée, elle faillit bien glisser sur le parquet telle une baleine échouée. Néanmoins, elle n'eut guère le temps de se moquer de son propre ridicule. « Comme un chef, évidemment ! » répondit-elle aussitôt. A l'inverse du ton enthousiaste de sa voix, elle s'empara doucement de la main de Tyler, celle qui molestait cette pauvre cravate. « Vraiment, bébé. Tu es parfait. » Elle appuya ses paroles d'un baiser au coin de ses lèvres. L'instant d'après, elle se redressait, lâchant un soupir à fendre l'âme. « C'était hyper égoïste de ma part de te traîner ici. Je pensais que ... Enfin, j'avais envie que tu les rencontres, bien sûr, sinon je t'aurais pas proposé. Mais pas comme ça. Je voulais pas me retrouver seule dans cette fosse aux lions, avec leurs balais dans le cul, un ange en glace et ces ... Ces immondes sushis ! Franchement, y a vraiment des gens pour manger des trucs pareils ?! » interrogea-t-elle, les yeux écarquillés tellement l'affirmative lui paraissait insensée. Et venant d'un ventre sur pattes, il aurait été bon que le chef se remette en question.
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Visiblement cette fête n'était facile pour personne, ni pour lui ni pour Casey. Elle semblait si désemparée qu'il s'en voulait presque d'être mal à l'aise. Encore un sentiment bizarre. De toute façon tout lui paraissait bizarre... Il fallait dire qu'il était pas vraiment habitué à tout ça. Il était pas habitué à tenir à quelqu'un à ce point, au point qu'il ferait n'importe quoi pour elle. Mais il devait se rendre à l'évidence, c'était bel et bien le cas: il ferait n'importe quoi pour Casey même mettre un costard, aller à une soirée de pète-secs et manger des sushis au caroube. Tout naturellement il alla l'enlacer. Ils en avaient visiblement tous les deux besoin. Il enfouit son visage dans les cheveux de Casey, y déposant un baiser. "T'en fais pas, tout va bien." murmura t-il avant de relâcher son étreinte. "T'as rien d'égoïste et puis... je suis content de rencontrer ta famille... même si je... enfin..." Tyler avait du mal à trouver les mots et pour cause ! Il s'apprêtait à être vrai et à parler de choses qu'il lui avait toujours été difficile d'aborder. Mais cette fois c'était Casey. Et il sentait qu'il devait dire quelque chose. Après tout, le présenter à ses parents était un grand pas, elle l'avait laissé entrer dans sa vie, la moindre des choses était qu'il en fasse autant pas vrai ? "Juste que j'ai jamais eu de famille, je sais pas ce que c'est et... ça me fait un peu... bizarre. Parce que du coup je sais pas ce que je suis censé dire ou faire ou... enfin tu vois quoi." dit-il alors dans un souffle. Bien sûr ce n'était rien que Casey ne savait déjà mais ça faisait quand même du bien d'en parler. Après tout c'était une période très importante, très déterminante de sa vie. "Mais je suis content de rencontrer ta famille... Enfin je crois !" rajouta t-il avec une pointe d'humour. Mine de rien, malgré le fait qu'il ai enlevé un petit poids de sa poitrine, il avait toujours qu'une envie: se barrer au plus vite de cette "fête".
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Elle se laissa aller à son étreinte, à la fois rassurée qu'il ne lui en veuille pas et tout à coup beaucoup plus détendue. C'était fou à quel point il lui suffisait, par moment. Souvent. Un peu trop. Elle qui n'avait jamais été du genre à s'enfermer dans une relation se surprenait à projeter des choses qu'elle n'avait pas imaginé trois mois plus tôt ... Le contexte. C'était seulement le contexte du jour, stressant et moins heureux qu'elle l'aurait souhaité pour son frère, qui lui embrouillait la tête, voilà tout. Dès qu'ils seraient sortis de ce premier cercle de l'enfer, tout irait mieux. Elle redeviendrait la jeune femme insouciante dont le seul objectif à long terme était le contenu de son prochain repas. Beaucoup plus sain. Et bien moins dangereux. « Une famille, on peut aussi la choisir, tu sais. » souffla-t-elle à son tour, comme pour le rassurer, l'image de Sonja s'intercalant dans son esprit. Elles ne partageaient peut-être pas le même sang, toutefois, l'indienne était telle la sœur qu'elle n'avait jamais eu. Concernant Tyler, elle ne l'avait jamais plaint et ne commencerait pas aujourd'hui : non seulement lui ne le supporterait pas, mais elle n'était pas de ces gens-là. Elle pouvait compatir, lui offrir son optimisme à presque toutes épreuves, mais certainement pas sa pitié. Il méritait mieux. Dommage qu'il ne semble pas s'en rendre compte. « Tu fais bien d'ajouter ce "je crois" ! T'as encore rien vu ! Attend un peu que mon père te bassine avec l'importance de l'engagement pour son pays et la beauté du métier de médecin ! Demain, soit tu finis dans un bureau en train de signer pour ton entrée dans l'armée, soit tu files à la fac' reprendre tes études ! » Évidemment, elle plaisantait. Pour les démarches, en tout cas. Le reste, mieux valait se méfier. Christopher était un passionné et il aimait le transmettre.
Avant qu'elle ait pu ajouter quoi que ce soit, la voix de Rose retentit provenant du rez-de-chaussée. Apparemment, Mia avait enfin daigné leur faire grâce de sa présence - c'était donc ça les "aaaaah" emphatiques qu'elle avait cru entendre provenant du jardin - et avait « préparé un discours » assura Rose. « Super. Miss Bitch a toujours l'art de soigner ses entrées. » Ils étaient partis pour une demi-heure de soliloque interminable, elle en aurait mis sa main au feu. Presque littéralement. Au moins, elle aurait fini aux urgences et aurait échappé à cette torture. « Promis, je trouve un moyen pour qu'on s'éclipse juste après. » assura-t-elle à son binôme tandis qu'ils retournaient dehors. En effet, sa belle-sœur était bel et bien là, radieuse dans une robe couleur framboise. Maquillage impeccable, sourire colgate, longues boucles bruissant dans son dos bien droit ... Un mannequin de chair et d'os. Surtout d'os. Elle ressemblait à un coton-tige trempé dans de la bétadine, avec sa robe. « Merci à tous d'être venus ! Carl et moi sommes si heureux que vous ayez pu vous libérer si vite ! » commença-t-elle en roucoulant presque, tenant son futur mari par le bras. Lequel paraissait encore ne pas comprendre ce qu'il fabriquait là. « Je serai brève ! Carl et moi voulions simplement vous annoncer deux grandes nouvelles ! » Casey sentit le sang quitter ses joues. Non, pas ça. Me dites pas que ... « Nous attendons un enfant ! » s'exclama-t-elle avec force de joie et mains posées sur son ventre ridiculement plat. « De fait, Carl a enfin accepté l'offre de mon père à rejoindre son cabinet ! N'est-ce pas génial ? » L'assemblée applaudit, ne tardant pas à se ruer vers le couple afin de les féliciter. Mais Casey, elle, ne bougea pas. On aurait dit qu'elle avait reçu un coup de massue sur la tête. « Je crois que je vais être malade. » C'était donc ça ! La raison pour laquelle Carl était revenu, toute cette mascarade ... Il avait même renoncé à un boulot qu'il adorait à cause de ... D'elle ... De ... « Casey ! Et bah mon chou, t'es toute pâle ! Qu'est-ce qui va pas ? Toi aussi t'es enceinte ? » Grand-mère Alma, cheveux oranges permanentés et marchant difficilement avec sa canne - donc plus lente que les autres - arrêta son chemin pour venir à la rencontre de sa petite-fille. Elle souriait de tout son dentier, ses yeux pétillant de malice. Ce petit show l'amusait drôlement, contrairement à sa descendante. « Hein ? Quoi ? Non ! Mais quelle putain de sal... » Une main se referma sur sa bouche avant qu'elle ait pu terminer son insulte. Tyler. Son sauveur. Il venait de l'empêcher de commettre l'irréparable, à savoir insulter sa belle-sœur à haute voix. Bien que concernant Alma, ce fut surtout un rire tonitruant qui parcourut son corps vouté. « Très bon réflexe, mon garçon. Vous êtes ? »
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Tyler n'essayait pas de se faire plaindre. Certainement pas ! Il aimait sa vie et son passé tels qu'ils étaient, même si ça n'avait pas été facile. Il n'avait jamais eu de domestique ni rien de tout ça, au contraire il était plutôt du genre à dormir avec les chiens et leurs tiques - façon de parler évidemment. Mais justement, c'est ainsi qu'il était devenu l'homme qu'il est aujourd'hui. Alors non il ne voulait certainement pas se faire plaindre, mais simplement expliquer pourquoi c'était si compliqué pour lui d'être ici, dans ce genre d'endroit. Il était mal à l'aise et ne se sentait pas du tout à sa place, mais c'était sûrement normal compte tenu de ce qu'il avait vécu. Oui, c'était sûrement normal. "J'éviterais de mentionner que j'ai commencé des études de médecine et arrêté au bout de deux ans alors !" s'exclama Tyler juste avant que Rose ne les appelle pour écouter le discours de Mia. Vu la réaction de Casey à côté de lui, ça n'allait pas être triste. Il se leva et lui prit la main. Ils se retrouvèrent bien vite au milieu d'une assemblée autour d'une jeune femme qui, il ne l'avouerait sûrement pas à Casey surtout vu comment elle la détestait, était plutôt canon. C'était peut-être une belle garce mais elle avait les arguments pour contrebalancer... Par contre sa voix de crécelle quand elle se mit à faire son discours était un vériable supplice. Il fut alors temps pour Mia d'annoncer qu'elle était enceinte, et accessoirement que Carl abandonnait littéralement tout pour elle. A sa place c'est pas un flingue que Tyler se serait mis sur la tempe, c'est carrément un bazooka. Il jeta un oeil à Casey qui avait l'air d'être sur le point de tomber dans les pommes. Elle devait probablement s'imaginer ce fœtus telle une bactérie, un virus mortel engendré par une catin des enfers. Tyler ne put s'empêcher de sourire à cette idée. C'est alors que Grand-mère Alma fit son apparition déclenchant une réaction chez Casey que Tyler s'empressa de stopper. "...bonne nouvelle. Une putain de bonne nouvelle !" s'exclama t-il avant d'enlever sa main de la bouche de Casey. "On finit les phrases de l'autre, c'est pas mignon ça ?" renchérit-il en la regardant, les yeux plein de malice. Mais la grand-mère n'était pas dupe. "Tyler Alcott, le petit-ami de Casey." répondit-il avec un petit sourire. C'était toujours un peu difficile à dire mais ça l'était de moins en moins. "Et vous êtes grand-mère Alma, c'est bien ça ?" "C'est bien tu l'as bien fait réviser ma petite Casey !" s'exclama gaiement la grand-mère. "TOI !" s'exclama soudain le père de Casey. "Si tu fais pareil avec ma fille je te la coupe, c'est clair ?" Et il partit en trombe, aussi vite qu'il était arrivé, Rose Griffith lui courant après, essayant de le calmer. "Je suppose que même tes parents n'étaient pas au courant et qu'ils ne sont pas des grands fans de Miss Charlotte Aux Fraises ici présente ?"
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Casey fulminait. Elle devait ressembler à un boeuf, à souffler de nerfs contre la paume de Tyler, lequel était parvenu à retenir la tempête qu'elle rêvait de déchaîner. Alma était aux anges : dans son quartier, elle n'avait jamais autant d'animation. Et puis, sa petite-fille avait un petit ami qui semblait aussi drôle que beau. Que demander de plus ? « Ouais, je lui ai promis un QCM avec case à cocher sur moi ce soir, s'il était sage. » rétorqua-t-elle avec humour - oui, devant sa grand-mère - malgré ses sourcils froncés et ses joues devenues rouges de colère et de frustration. T'as bien failli provoquer un esclandre, alors tiens-toi avant que ça tourne mal s'admonesta-t-elle intérieurement. Il fallait vraiment qu'elle se calme. La vie privé de son frère ne la regardait pas, ses choix encore moins. Elle inspira un grand coup ... Et Chris Griffith débarqua, sommant Tyler, pauvre dommage collatéral d'une croisade que son père avait finalement lancé à sa place. « Non mais ! Papa ! » Trop tard, il avait déjà filé, Rose sur ses talons. Son père était dur à la tâche : il ne se mêlait pas des relations de ses enfants, n'avait jamais fait montre de la moindre lassitude envers Mia - restait même en-dehors des histoires récentes, préférant la sécurité de son hôpital -, mais là, la jeune femme était allée trop loin. Pour qu'il en arrive à s'énerver de la sorte, devant public en plus, c'était vraiment qu'il avait atteint son point de saturation. « Si ma mère l'avait été, mon téléphone aurait sonné dans la minute. Par contre, je pensais qu'ils la supportaient ... Je m'excuse pour lui, ce n'était pas contre toi. » Visiblement, elle s'était trompée sur la façon dont ses parents voyaient leur belle-fille. Et c'était d'autant plus délicat maintenant qu'un pauvre petit être qui n'avait rien demandé se retrouvait mêlé à tout ça. Elle observa les Flowers gronder à voix basse ... Ou pas. Le père de Mia reprocha bien fort à Christopher son manque de savoir-vivre, ainsi que son attitude face à la nouvelle. Ce dernier était à peine rentré dans la maison qu'il fit demi-tour, son regard lançant des éclairs. « Oh merde. Merde, merde, merde ... » Elle ne l'avait jamais vu dans un état pareil, pas même quand elle avait planté la voiture familiale après avoir voulu éviter un chat sur la route. Pas même quand elle lui avait annoncé qu'elle abandonnait son statut d'infirmière. « VENEZ ME LE RÉPÉTER EN FACE. » « Chris, s'il te plaît, calme-toi ! » Les choses s'envenimaient clairement. Mia avait commencé à pleurer tout en hurlant, sa mère tentant de la consoler. Les deux hommes se rapprochaient dangereusement. Et Carl restait planté au milieu de la pelouse, l’œil éteint, sirotant son champagne comme si tout ceci ne le concernait pas. Quant à Casey, elle ne savait plus où donner de la tête, celle-ci tournant en tous sens. Le moment était idéal pour battre en retraite en entraînant Tyler avec elle ... Sauf que Mr Flowers eut la très, très mauvaise idée d'empoigner son père par le col. « Mais qu'est-ce qu'il fout, lui ?! » Christopher tenta de le repousser, sauf que l'autre s'accrochait. Elle le vit lever le poing pour laver l'affront. Elle ne réfléchit pas : deux enjambées plus tard, elle les rejoignait et assénait au père de Mia un coup de talon dans l'arrière du genou, lui faisant perdre l'équilibre. L'instant d'après, alors qu'il était à genoux, elle le tenait par l'oreille d'une main, l'autre lui faisant une clef de bras. Et vraiment, cette position était très inconfortable pour elle - toujours rapport à cette foutue robe. « JE VAIS VOUS METTRE UN PROCÈS AU CUL ! JE VAIS TE FAIRE VIRER, SALE ... » « SALE QUOI ? DE QUOI VOUS TRAITEZ MA FILLE ? » Cette fois, c'était Rose. Casey ne l'avait pas entendu crier depuis des années. « ON SE CALME. » L'ambulancière ne semblait guère perturbée par la scène. Au contraire, elle avait retrouvé toute sa maîtrise. « Monsieur Flowers, je veux bien vous lâcher si vous prenez votre beuglarde, votre bonne femme et ... Enfin, les autres, là. Avec leurs chapeaux moches. Oh et puis les sushis aussi. Franchement, ils sont dégueulasses. » Puisque personne n'osait intervenir, probablement encore une fois sous le choc, et aussi parce que l'homme commençait à souffrir de sa position, la bagarre mourut dans l’œuf. Elle le relâcha alors qu'il annonçait qu'il en avait assez de ces conneries, que "allez Martha, Mia, on s'en va !" et que les invités - ainsi que le musicien et le traiteur - quittaient le jardin précipitamment, drapés dans leur dignité de gros cons, une Mia toujours sanglotante dans leur sillage. Seuls restaient les Griffith. Dont Carl. Qui n'avait toujours pas bougé. Rose s'empressa d'aller à sa rencontre et le conduisit vers l'intérieur en lui murmurant quelques paroles probablement de réconfort. Christopher, pour sa part, affichait une mine impassible. « Virez-moi ces fanfreluches de bourges, on va faire un barbecue avec. J'ai de la viande au congélo. » finit-il par décider après un silence pesant. « Alcott, désolé pour cette scène. J'espère que vous voulez bien nous donner une seconde chance. Venez m'aider à sortir la nourriture et après, on vous montrera ce que c'est une vraie réunion chez les Griffith. » Toute famille normalement constituée aurait mis fin aux restes de cette rencontre, se serait enfermée chez soi pour oublier l'embarras de cet évènement, mais pas eux. Chez les Griffith, on ne se laissait pas démonter et on retirait toujours le meilleur d'une situation merdique. « Papa, vaut mieux qu'on y aille. » « Pas question. » Bien, inutile de discuter quand il employait ce ton-là. Elle en avait assez fait pour aujourd'hui. « Si tu me cherches, je serai la fille avec la bouteille de champagne. » assura Casey tout en claudiquant vers les bouteilles pleines, non sans s'être débarrassée de ses chaussures au passage. Elle s'était tordue la cheville et contre la douleur, l'alcool restait un excellent remède. Et si Tyler en profitait pour prendre la poudre d'escampette, vraiment, elle ne lui en voudrait pas.
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Tyler était tétanisé. En un claquement de doigts la soirée avait complètement dérapé. Tout le monde s'était mis à se crier dessus et c'était à deux doigts de finir en bagarre générale. Tyler y aurait même participé (pour remettre à sa place le père de la fiancée qui s'était permis d'insulter Casey) mais l'ambulancière avait été plus rapide et s'était littéralement jetée sur lui. Bref, c'était le chaos. Tyler restait muet devant ce spectacle. A ses côtés, la grand-mère de Casey semblait s'éclater comme une petite folle. Un grand sourire s'étalait sur son visage, c'était à croire qu'elle voulait presque que les Griffith foutent une raclée aux envahisseurs ! Un claquement de doigts plus tard et les intrus repartaient déjà la queue entre les jambes avec leur balais dans le cul et leurs sushis immondes. Quant à Tyler il était toujours immobile à regarder le spectacle, son verre à la main, la grand-mère à ses côtés qui jubilait, pratiquement à deux doigts d'applaudir ! Tyler avait du mal à croire à ce qu'il venait de se dérouler. Mais les Griffith semblaient déjà passer à autre chose, se préparant déjà tous à leur façon pour faire une vraie réunion de famille. Tyler regarda Casey balancer ses chaussures à talons avant de claudiquer jusqu'aux bouteilles pleines. Il ne put s'empêcher de sourire avant d'être rappelé à l'ordre par Christopher. Tyler s'arracha à son spectacle et le rejoignit. Ensemble ils récupérèrent la viande avant que Chris ne lui demande d'allumer le barbecue. "Je... quoi ?" bafouilla t-il, troublé. "Et bien Alcott ? Vous n'avez jamais allumé de barbecue ou bien ?" s'exclama le militaire. "En fait... non, jamais. C'est... On a pas l'habitude des réunions de famille chez moi." Tyler était assez troublé, tout ça était très nouveau pour lui. Et le fait que Chris se mette à sourire, lui file une tape dans le dos en lui disant "Tu vas voir c'est pas si compliqué fiston.", était au delà de tout. Il tint bon le temps d'apprendre à allumer un foutu barbecue - surtout qu'en effet, c'était simple comme bonjour - avant de finalement s'éclipser. "Excusez-moi un moment." avait-il dit avant de partir à grands pas, jetant à peine un regard à Casey sur le chemin. C'était... compliqué. Il avait envie de hurler, de pleurer et de cogner dans des murs, tout ça à la fois, c'était étrange. Il se sentait pas bien. Tout ce qu'il avait trouvé pour se remettre c'était de sortir de la propriété et d'aller prendre le sachet qui se trouvait dans la boîte à gants. Une cigarette aurait suffit mais il n'en avait pas sur lui. Tyler essaya ainsi de se convaincre que se défoncer était nécessaire...
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Sa mère étant occupée à essayer de remonter le moral de Carl - et considérant que Casey n'aurait certainement pas arrangé la situation, elle s'était abstenue de les rejoindre -, elle n'était donc pas là pour l'empêcher de boire au goulot. Quand à son père, il semblait avoir trouvé un nouveau troufion à former aux joies du barbecue, activité virile et quelque peu ... Paternelle. Son attitude envers Tyler l'étonnait. Elle s'était plutôt attendue à ce qu'il le bombarde de questions ou, au mieux, l'ignore. Mais visiblement, l'ambulancier lui avait tapé dans l’œil pour une raison qui échappait à la jeune femme. Quoi que non, son petit-ami - s'habituerait-elle jamais à l'appeler ainsi ? - était bourré de qualités qu'elle lui reconnaissait volontiers, elle ne pensait seulement pas que son âne de père s'en rendrait compte aussi vite. « Et donc, tu vois, c'est un placement vraiment très sûr et ... » Erreur de débutante : s'installer quelque part, seule ... Soit laisser l'opportunité à l'oncle Bob de vous mettre le grappin dessus. Elle lui avait déjà répété au moins dix fois sur autant d'années qu'elle n'était pas intéressée par ses magouilles - euh, son travail -, néanmoins, il faisait partie de ces gens pour qui « non » signifiait « peut-être » et qui pensaient pouvoir vous avoir à l'usure. Avant que le visage de son oncle ne se superpose à celui d'un certain producteur écroué pour violences sexuelles, sa grand-mère intervint en faisant mine de yoyoter. « Bobby ? Mon chou ? Je crois qu'il faudrait changer ma couche ! » Casey dut contenir un éclat de rire tandis que l'oncle Robert virait au blanc crayeux. « Tu portes des couches maintenant, maman ?! » Et de lancer des regards éperdus autour de lui à la recherche de sa femme. « Jaaaane ? Il faudrait changer la couche de maman ! » lança-t-il à la cantonade. L'ambulancière allait s'écrouler de rire, c'était certain, surtout vu le regard malicieux que lui renvoyait sa grand-mère. Toutefois, elle n'eut guère le temps de profiter de cette nouvelle scène : ses prunelles furent happées par la silhouette de Tyler qui s'échappait du jardin. « Excuse-moi, mamie, je reviens. » Elle mit un moment à le rejoindre à cause de sa cheville toujours douloureuse. Il ne lui fallut qu'un instant pour comprendre que l'herbe qu'il tenait n'était pas destinée à relever les côtes de bœuf. « Tu fais quoi exactement ? » interrogea-t-elle, sourcils froncés, visiblement mécontente. Elle n'avait rien contre une petite défonce - habillée ou non - mais pendant un repas de famille ? Non, là, ça poussait un peu trop le vice.
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Qu'est-ce qu'il était en train de se passer ? Tyler tentait de retourner ça dans tous les sens, mais il ne savait pas. Il ne savait pas si c'était la soirée qui avait dérapé ou lui, ou les deux. Il était complètement perdu. Il fallait dire que tout ça c'était vraiment beaucoup pour lui, et maintenant il regrettait amèrement d'avoir accepté l'invitation de Casey. Il n'aurait pas du. Et il avait comme le sentiment qu'il n'était pas au bout de ses peines. Mais tout ça ? Entrer dans la famille de Casey c'était trop... réel ? Oui, c'était peut-être ça. Pourtant c'est ce qu'il voulait non ? Il voulait Casey. Il le lui avait dit, il ne pouvait pas être ami avec elle. Il avait même été prêt à quitter son boulot - enfin, à se faire transférer plus exactement -, boulot qui est toute sa vie. Il a failli le faire, pour elle. Et voilà que maintenant Tyler rencontre sa famille et fait un blocage ? C'était ridicule. Et il en était conscient. Il s'en voulait d'être à l'extérieur, prêt de sa voiture, en train de fumer un joint. Bon d'accord, il aurait préféré une clope - du moins c'est ce dont il essayait de se convaincre - mais il n'en avait pas sur lui. Quoi qu'il en soit il s'était éclipsé, et Casey l'avait bien vu. D'ailleurs il savait qu'elle allait le rejoindre, et ça ne manqua pas. Il releva à peine les yeux vers elle, se contentant de deviner son air contrarié en écoutant sa voix. Cette discussion allait mal finir il en était certain. "Ecoute, j'ai pas envie de me prendre la tête ok ?" commença t-il alors, agacé. Il savait pertinemment qu'il ne ferait qu'aggraver les choses. Et au fond, c'est peut-être ça qu'il cherchait. A tout saboter. "J'ai juste besoin de prendre l'air." Il avait parlé d'un ton sec et ferme, presque froid, ça ne lui ressemblait pas. Il n'avait même pas osé la regarder en face. Au lieu de ça il resta les yeux dans le vague, à fumer son joint distraitement. Essayant d'occulter le fait qu'il était visiblement en train de saboter sa relation avec Casey. Pourquoi il faisait ça ? Lui-même l'ignorait.
- InvitéInvité
Ecoute, j'ai pas envie de me prendre la tête ok ? Sérieusement ? Si c'était le cas, alors il s'y prenait vraiment comme un manche. Non content de filer à l'anglaise pour s'enfiler un splif dans le plus grand des calmes, il avait en plus l'audace d'être désagréable. Casey inspira, cherchant dans sa mémoire un vieil exercice de méditation qui l'empêcherait de lui ruer dans les brancards. Elle n'aimait ni son ton, ni son attitude glaciale. Et à dire vrai, la dispute qui avait eu lieu dans le jardin moins de vingt minutes plus tôt l'avait remué plus qu'elle ne voulait bien le montrer. La dernière chose dont elle avait besoin, effectivement, était d'une prise de tête. A condition qu'on ne vienne pas la chercher non plus. « Ouais, une bonne petite bouffée de marijuana, rien de mieux pour se revigorer. » répliqua-t-elle de la même voix frileuse, le sarcasme pointant sans qu'elle tente de le dissimuler. Elle finit par secouer la tête, dépitée. D'accord, il n'avait pas signé pour une garden-party devenue zone de guerre. Oui, il était bourré d'insécurités dont elle avait parfaitement conscience et avec lesquelles elle l'avait pris, malgré tout. Et oui, peut-être qu'elle aurait dû se montrer plus compréhensive, plus insouciante ... Sauf qu'un peu plus loin, son frère voyait probablement sa vie s'écrouler et que plutôt que de le soutenir, elle était là, pieds-nus sur le bitume à essayer de gérer l'attitude puérile de Tyler. S'il y avait un choix à faire, alors elle avait fait le mauvais. L'ambulancier n'était plus sa priorité. « Rentre chez toi pour le finir, ton joint. Je veux pas de ça ici, c'est ni le moment ni l'endroit. Je dirais que t'as eu une urgence. » Traduction : je te retiens pas . Il avait mauvais caractère ? On avait tendance à oublier que poussée dans ses retranchements, elle aussi. Le mieux était donc qu'ils en restent là pour aujourd'hui. Aussi, sur ces mots et sans un regard, fit-elle demi-tour et commença-t-elle à s'éloigner pour le planter là sans autre forme de procès. Après tout, il avait affirmé qu'il ne voulait pas de dispute, il serait probablement content qu'elle respecte son désir.
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