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YESTERDAY'S NEWS |48
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Pourquoi est-ce qu'il la regardait, au juste ? Il voulait quoi ? Décidément, Casey n'était pas d'humeur et avec le jeune homme dans le coin, son agacement ne cessait de monter en grade. « Excuse, 'faut que j'y aille. » Tant pis, elle n'avait pas besoin de pantalon ! Ou alors, elle le mettrait dans le couloir, qu'est-ce que ça pouvait bien faire ? La moitié de la caserne l'avait déjà surprise en sous-vêtements, de toute façon. Sauf que Tyler ne l'entendait pas de cette oreille, cherchant à la retenir alors qu'elle s'écartait des casiers, prête à lui passer devant, à le planter là. « Moi, je crois pas. » rétorqua-t-elle plutôt vertement. Un pas de plus. Pas démonté pour un sou, il reprit. Elle releva la tête qu'elle avait baissé sur son sac abandonné par terre, le fixa, la bouche légèrement entrouverte, tel un poisson jeté hors de son bocal. La capote ... Putain, on n'a pas mis de capotes ?! pensa-t-elle en premier lieu. Elle s'était pourtant repassée la nuit en tête de nombreuses - très nombreuses - fois et n'avait absolument pas percuté ce « détail ». Ce n'était pas son genre. Normalement, elle prêtait une attention maniaque à ces choses-là. Elle avait une formation médicale, bordel ! Qu'est-ce qui lui était passé par la tête ? Qu'est-ce que ce type avait bien pu lui faire, pour que son cerveau soit retourné à ce point-là ?
Mais elle oublia bien vite ce premier choc, soufflée qu'elle fut par le second. Ses lèvres se refermèrent dans un bruit de mâchoires tendues. Son regard se fit sombre, annonce de la tempête qu'elle couvait depuis le début de la journée. Et c'est reparti pour un tour de la furie Griffith. « Si quoi ? Si je t'avais pas refilé quelques chaudes-pisses en passant ? Si d'ici une semaine, t'allais pas commencer à te gratter comme un perdu ? Si tu devais filer au dispensaire le plus proche pour te faire dépister ? Bah non, Tyler, t'as pas besoin ! Parce que d'habitude, je fais super gaffe ! Normalement, je fais pas sans ! Putain ! T'es trop chié ! C'est plutôt moi qui devrais m'inquiéter ! » Elle ramassa son sac, furieuse. Définitivement, pour le pantalon, ce serait ailleurs. Très loin de lui. « Tu sais quoi ? J'ai une idée, mais une genre géniale ! Avant ton rencard avec Katrina, demande-lui d'apporter ses dernières analyses de sang, ça mettra une super ambiance avant de la tringler - encore ! Et avant de la ramener chez toi, pense à lui dire que tu t'es tapé ta super collègue sûrement blindée de MST sur ton canapé ! Et dans ton lit ! Plusieurs fois ! Et que c'était putain de génial ! » Elle se tut aussitôt. Instantanément. Les yeux écarquillés. Mais quelle conne. Ça, elle n'était pas sensée le dire. Jamais. Surtout pas à lui.
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Ce n'est qu'en voyant le regard de Casey qu'il comprit qu'il avait dit une connerie. Ou qu'en tout cas elle l'avait mal compris. Quelque chose était allé de travers. Casey était furieuse, et elle avait de quoi. Du moins elle aurait eu de quoi si seulement elle n'avait pas mal interprété les paroles de Tyler. Il essayait bien d'en placer une pour mettre fin à ce terrible malentendu qu'il avait malencontreusement provoqué. Mais quand Casey était furieuse à ce point il était inutile d'essayer, tout les "Quoi?", "Attends", "Mais..." de Tyler étaient perdus sous la rage de l'ambulancière. Tyler se tut donc, la laissant finir son monologue enflammé, encaissant les coup-bas et les attaques personnelles sans broncher, jusqu'à ce qu'elle s'arrête. Est-ce que j'ai bien entendu ? Non c'était impossible, elle n'avait pas dit ça, il avait du mal entendre. Sauf que non, c'était bien ce qu'elle avait dit, cette nuit là ça avait été "putain de génial". Elle l'avait bien dit. Tyler en resta presque bouche bée, comme un con. Qu'est-ce qu'il pouvait bien répondre à ça ? Et puis est-ce qu'elle le pensait vraiment ? Non, c'était sûrement la colère, elle avait du dire ça comme elle aurait pu dire n'importe quoi d'autre. Après tout, elle lui avait bien faire comprendre qu'elle voulait faire comme si de rien n'était, qu'elle ne voulait pas en parler et puis elle était avec Clayton apparemment, non ? Alors oui, il avait sûrement mal entendu. Ou c'était pas ce qu'elle voulait dire. Dans tous les cas il devait y avoir une... explication rationnelle. Tyler déglutit, reprenant une contenance, prêt à faire comme si ce qu'elle avait dit n'était que le fruit de son imagination. Parce que c'est ce que ça devait être. "La pilule Casey. Je voulais savoir si tu prenais la pilule, c'est tout." répondit-il d'un ton qu'on aurait pu apparenter à de la lassitude. En fait il était plutôt étourdi. Par les commentaires de Casey sur leur nuit passée ensemble surtout. Mais ses autres paroles vinrent le frapper de plein fouet. "Et puis qu'est-ce que Katrina a à voir là-dedans ? Je te ferais dire que je sors pas avec deux personnes à la fois moi ! C'est quoi l'histoire, t'avais trop le feu au cul alors t'es venue me voir après que Clayton ai fait sa p'tite affaire ?" lâcha t-il laissant la colère - et probablement la jalousie aussi - sortir. Les mots étaient sortis tout seuls, à vrai dire il réalisait à peine ce qu'il disait. "Et puisque tu le demandes si gentiment, non je n'ai pas de MST, je me protège en temps normal. Alors, t'en fais pas, tu vas pouvoir continuer à jouer les chiennes en chaleur. Bah tiens, si t'as pas ta dose d'orgasme avec Clayton a votre prochain rendez-vous, t'auras qu'à te repointer chez moi. Parce que façon je pense qu'avec ma queue et j'ai pas de coeur, c'est bien connu." répliqua t-il à mi-chemin entre la froideur et le sarcasme. Il était allé trop loin, il en était conscient. Mais pour le coup, il fallait avouer que ça faisait du bien d'expulser tout ça. Parce que contrairement à ce qu'elle pouvait penser, Tyler ressentait les choses aussi. Il avait ressenti beaucoup de choses ces derniers temps, des choses qu'il tentait d'opprimer et d'oublier et sur lesquelles il préférait ne pas mettre de nom.
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"La pilule Casey. Je voulais savoir si tu prenais la pilule, c'est tout." « Oh. » Son interjection sonne comme un hoquet. Contrite, on pourrait presque l'entendre déglutir. Elle a merdé. Grave. Pas seulement en avouant l'effet que leur unique nuit passée ensemble lui avait fait - il semblait, de toute façon, ne pas avoir relevé. Mais pour le reste. Ce qu'elle avait dit était tout simplement horrible. Cruel. Mais répond-lui, bordel ! Et puis, excuse-toi, couillonne ! Sauf qu'aucun mot ne daigne passer ses lèvres. La détresse qu'elle a provoqué chez Tyler et qu'elle lit sur son visage lui coupe le souffle. Elle a honte ... Tellement honte ... Toutefois, cela ne dure pas. Les traits de l'ambulancier ne tardent pas à changer pour une expression qu'elle lui connaît bien, qui fait écho à celle qu'elle vient de lui partager avec force de virulence. Et elle n'est pas déçue du voyage. Non content de l'accuser de bouffer à tous râteliers - une expression polie pour dire qu'en fait, il la traite de salope -, il se permet de se victimiser en parlant du soit-disant « coeur de pierre » qu'elle lui prêterait. Le sac retombe pour la énième fois. Elle le fixe. « T'as dit quoi ? » Sa voix gronde, mordante. Hargneuse. « Tu m'as traité de quoi ? » Ses doigts brûlent du crochet du droit qu'elle rêve de lui envoyer en plein dans son joli nez. D'ailleurs, elle a serré les poings. Il a beau la dépasser d'une bonne tête et être beaucoup plus fine que lui, ce n'est pas ce qui l'effraie. Elle en a séché d'autres avant lui. Mais non. Elle ne lui fera pas ce plaisir. Parce que c'est à croire que c'est tout ce qu'il attend : qu'elle en vienne aux mains pour avoir une bonne raison de se débarrasser d'elle, de cette « conversation », comme il l'a fait avec la fille, quand son équipière s'est pointée chez lui. Alors, au lieu de céder à son instinct grégaire, elle trouve un compromis : d'une main, elle repousse son torse. Pas très fort, juste assez pour appuyer sa colère. « Répète un peu pour voir ! Allez ! » Nouveau coup de paume. Il va se cogner contre la rangée de casier derrière lui, si ça continue. « Je ne suis pas une de tes meufs ramassées dans un bar, Alcott ! Et je t'emmerde, espèce de connard décérébré ! Je devrais même pas avoir à me justifier ! Je ne sors pas avec Clayton ! Je l'ai planté après le premier verre, pour venir te voir ! Parce que j'en pouvais plus de pas avoir de tes nouvelles ! Et tu crois que j'aurais débarqué pour ... Oh bordel. Putain, si je te prenais vraiment pour un gros bâtard qui pense qu'avec sa bite, j'aurais changé d'unité depuis longtemps ! On parlerait même pas à l'heure actuelle ! Pauvre débile ! » Son visage s'est défait progressivement. Aux rougeurs succèdent une teinte un peu verdâtre, comme si elle allait être malade. Même sa dernière insulte résonne avec moins de morgue qu'elle l'aurait voulu. « J'ai pas baisé avec lui, c'est clair ? Je ... Je « sors » avec personne ! Mais franchement, pour qui tu m'as prise ?! Et puis, qu'est-ce qu'il vient foutre dans cette histoire, lui aussi ? Même si c'était le cas, qu'est-ce que ça pourrait bien te faire ? Oublie. J'me tire. » Elle secoue la tête, hébétée, récupère ses affaires et cette fois, va pour s'en aller pour de bon. Vu la piètre opinion qu'il avait d'elle, elle considérait avoir suffisamment ramassé pour le siècle à venir.
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Il l'avait cherchée en même temps. Il ne pouvait pas s'attendre à ce que tout aille mieux après ce qu'il lui avait sorti. Il devait bien reconnaître qu'il avait été particulièrement injuste voire même cruel avec elle. Tyler s'en voulait, certes, mais ce qui lui pesait c'était surtout de constater où ils en étaient rendus. Eux qui étaient si proches, qui passaient leur temps à rire ensemble, voilà que maintenant ils se criaient des insultes, dans l'intention évidente de se blesser l'un, l'autre. Intention consciente ou non, mais bien réelle. Malgré tout, malgré l'horreur de cette situation, Tyler ne pouvait s'empêcher de se sentir soulagé que Casey ne sorte avec personne - et surtout pas avec ce connard de Clayton. Cependant ce n'était qu'un soulagement éphémère, bien trop vite remplacé par l'amertume et une sorte de boule qui lui nouait les entrailles. Le remords ? Oui, ça devait probablement être ça. Seulement les choses étaient dites à présent, et ces mots ne pouvaient plus être effacés. Tyler craignait qu'il ne soit trop tard pour réparer, mais il ne pouvait pas s'empêcher d'au moins essayer. Il était incapable de la laisser partir comme ça, au risque de... Non, il ne voulait pas y penser. Alors quand elle récupéra son sac gisant sur le sol et qu'elle fit quelques pas en direction de la sortie, ce fut d'un geste mécanique, pur réflexe, qu'il lui attrapa le poignet. "Casey, attends... s'il te plait, je..." Je quoi ? Je ne suis qu'un con, un minable, je suis désolé ? Que pouvait-il bien dire pour l'empêcher de partir ? Que pouvait-il bien dire pour effacer ce qu'il venait de se passer ? Rien, évidemment. Rien, malheureusement. "Ça me fait que je tiens à toi Casey. Et... je suis désolé. J'aurais pas du dire... enfin... je le pensais pas." Tyler regrettait amèrement. Mais il devait bien se rendre à l'évidence. Ils avaient tous les deux dépassé les limites, ils étaient allés trop loin. Probablement trop loin pour faire marche arrière. "Et je sais que tu le pensais pas non plus. Enfin... j'espère parce que..." Plus il essayait de parler, plus, pour une raison qui lui était inconnue, il avait du mal à parler. Comme si les mots venaient se coincer dans sa gorge. Parce qu'il sentait que cette fois ça pouvait vraiment mal finir. Tyler n'aurait peut-être pas du venir lui parler, il aurait simplement du éviter le sujet et oublier. Sauf qu'il ne pouvait pas oublier, et c'était tout là le cœur du problème. "Je veux pas te perdre Casey." avoua t-il finalement, ses doigts toujours agrippés au poignet de l'ambulancière.
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Il n'aurait pas dû la retenir. Elle se répéta cette phrase au moins une paire de fois, telle une supplique intérieure. Elle ne voulait pas qu'il le fasse. Parce qu'elle savait ce qu'il se passerait s'il le faisait. Elle craignait d'entendre ce qu'il allait forcément ajouter et qui ne ferait plus de sens dans cette relation bâtie sur une année. Alors, elle baissa les yeux sur son bras qu'elle avait attrapé, sur ce geste qui avait trop de sens. Qui impliquait trop de choses. Pourtant, elle ne se dégagea pas. Ne bougea plus, en vérité. Elle écoutait, sans croiser son regard, les excuses et ... Plus encore. Elle interprétait. Mais quoi, au juste ? Qu'est-ce qu'il essayait de lui dire, en réalité ? Qu'était-elle supposée comprendre de ce discours qui n'en était pas vraiment un ? Elle aussi, elle tenait à lui. Elle ne s'en était jamais cachée. Il était son collègue, son binôme, son âme sœur de terrain. Elle aurait remis sa vie entre ses mains les yeux fermés. La question n'était pas là. Ou si ? Et si le cœur du problème se situait à mi-chemin entre l'étau de ses doigts et sa peau soudain brûlante ? Tout ce qu'ils avaient fui, la distance sécuritaire qu'ils avaient instauré, n'avait fait que retarder l'inéluctable. "Et je sais que tu le pensais pas non plus. Enfin... j'espère parce que..." « Tyler, arrête. » Elle souffla ces mots plus qu'elle ne les prononça. Ils étaient maintenant deux à avoir presque perdu la voix. Sa respiration était bloquée dans sa poitrine, enfouie sous le nœud que formait son estomac. Je veux pas te perdre. Et lui, ne s'était pas arrêté. « Je sais. » Elle consentit enfin à relever le menton vers lui. Récupéra doucement son poignet. Elle lui échappait. S'en voulait déjà de ce qu'elle allait faire. Sauf qu'il le fallait. Elle n'avait pas le choix. Ou plutôt, si, elle l'avait, seulement ... L'un lui paraissait moins raisonnable que l'autre.
Clac. Pauvre sac baladé anarchiquement à la verticale. Ce bruit sourd, c'était celui d'une énième chute. Comblant la maigre distance qui les séparait, elle vint s'emparer délicatement des joues de Tyler. Puis de ses lèvres. « Je sais. » répéta-t-elle contre ces dernières. Elle avait donc choisi l'option la plus insensée.
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Tyler ne mesurait pas encore l'impact que ses gestes ou ses mots pouvaient avoir. En vérité il ne savait plus trop ce qu'il devait faire ou dire ou penser. Il n'arrivait pas à penser. Il était complètement perdu, dans une brume épaisse de doute, de peur, de regrets, de confusion, et de beaucoup d'autres sentiments anonymes. Mais c'était ainsi, il ne voulait pas la perdre. Il n'arrivait pas à imaginer ne plus la voir, ne plus la côtoyer, ne plus la toucher... Non, la laisser partir ça il en était incapable. Il devait réparer les choses. Après tout c'était de sa faute, il était l'instigateur de... ces choses. Il était normal que ce soit lui qui essaie de réparer les dommages. Comment décrire ce qu'il a ressenti quand il l'a entendue répondre "Je sais", quand il l'a vue se retourner, quand elle a abandonné son sac au sol... Non, c'était indescriptible. Entre un immense soulagement, un poids qui disparaît dans sa poitrine et l'impression de pouvoir respirer à nouveau. Et puis s'était rapprochée, réduisant à néant l'espace qui les séparait. La sensation de ses doigts sur ses joues était merveilleuse, mais ce n'était rien en comparaison à ses lèvres. A leur goût qu'il avait l'impression de découvrir pour la première fois. Pourquoi tout cela était-il en train d'arriver ? Tyler n'en savait rien, et pour quelques secondes il refusa de penser à cette question. Ne pensant qu'à ce contact qu'il avait tant désiré sans même s'en rendre compte. Ce contact qu'il approfondit, laissant ses mains encadrer le visage de Casey avant de retrouver leur place naturelle, avides qu'elles étaient de se nicher au creux de ses reins. Tyler avait même entreprit de plaquer Casey contre les casiers des vestiaires, pris de passion. Seulement c'est ce moment là que choisit la question pour resurgir dans son esprit, stoppant tout élan de passion. Tyler s'écarta légèrement, n'arrivant pas encore à se résoudre à cesser tout contact, et soupira. "On devrait pas..." Quoi ? Se toucher, s'embrasser, avoir des sentiments ? Tyler ne finit pas sa phrase. Mais les sous-entendus seraient assez forts cette fois-ci pour qu'il n'y ait aucun malentendu. "C'est à cause de ça qu'on en est là après tout, c'est sûrement pas une bonne idée qu'on... continue." lâcha t-il finalement à contre-cœur. Ce n'était pourtant pas l'envie qui manquait. Tyler était loin de manquer de passion, ou de l'envie de la sentir contre lui à nouveau. Même une seule fois. Mais était-ce vraiment raisonnable ? Certes, il n'avait jamais été du genre raisonnable mais le risque était trop grand. Il avait trop besoin d'elle pour risquer de la perdre. Alors peut-être que pour la première fois dans sa vie, il allait faire le choix raisonnable. Mais à ce stade, rien n'était moins sûr.
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C'était comme une explosion de mille couleurs et d'autant de sensations. Retrouver le contact de cette bouche qu'elle avait tenté d'occulter avec force de déni, sentir ses mains glisser autour de sa taille, c'était comme rentrer à la maison après un très long voyage - et notre ancienne militaire s'y connaissait, dans ce domaine. Elle n'avait soudain, plus envie d'être ailleurs, et encore moins loin de lui. Il lui semblait être exactement à sa place, ainsi contre lui, qu'importe la fraicheur du métal dans son dos. Et l'essentiel était partagé, elle n'avait aucun doute sur ce point, au regard de la ferveur que Tyler y mettait lui aussi.
Pourtant, il rompit leur étreinte. Sans trop s'éloigner pour autant, il exprima une inquiétude qui faisait écho à celle de l'ambulancière. A cause de ça, de cette nuit, leurs retrouvailles avaient été teintées de gêne et même de colère. Eux qui s'entendaient si bien, jusque-là. Qui avait construit un lien peut-être plus puissant que n'importe quelle amitié ... Ou relation de couple. Avait-elle vraiment envie de prendre tous ces risques pour ... Pour quoi, exactement ? Elle le savait au fond. Elle connaissait la réponse. Et la peur qui en résulta, cette vérité qu'elle refusait d'assumer, lui permit d'articuler : « T'as ... T'as raison. » Elle le repoussa doucement, à contre-coeur, cette distance qu'elle recréait lui arrachant presque l'âme. Et le désir qu'elle sentait toujours pulser dans son bas-ventre n'en était qu'une infime justification. « On est une équipe. C'est plus important que ... Tout le reste. » Quoi que ce soit ce reste et ce qu'il implique. Comme pour couper toute velléité de retour en arrière, elle s'empressa d'enfiler un pantalon, venant déposer un baiser sur la joue de Tyler après avoir récupéré ses affaires. Elle lui adressa même le sourire le plus gentil qu'elle put trouver, comme pour dire « allez, on passe à autre chose, on oublie, c'était juste une petite erreur de parcours ». « Je vois Sonja ce soir, 'faut pas que je la fasse attendre ... On se voit demain. » Sur ces mots, elle quitta les vestiaires. Le crâne prit dans un étau et le cœur au bord des lèvres.
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Mais quel con... Ah ça il s'en voulait ! Pourtant, au fond, il savait que c'était la meilleure solution. Après tout, ils avaient mis les choses au clair, alors il ne devrait plus y avoir de problème pas vrai ? Tout redeviendrait comme avant, comme s'ils n'avaient jamais partagé une nuit merveilleuse ensemble. Oui, c'était le mieux à faire, même si ça faisait terriblement mal. Plus mal que Tyler ne l'aurait cru possible. Pourquoi était-ce douloureux ? Sûrement parce qu'il revoyait les images de sa nuit avec Casey en boucle dans sa tête, parce qu'il sentait encore ses doigts sur sa peau, le goût de ses lèvres... "Oui, une... équipe." approuva t-il, tentant de paraître satisfait de la situation. Mais ses mots lui semblaient tellement faux ! Pourtant c'est bien ce qu'il fallait faire, être coéquipiers, être un binôme, être des... amis. Rien de plus. Tyler ferma les yeux un instant quand Casey vint déposer ce qui ressemblait à un dernier baiser, sur sa joue. Il soupira, et répondit comme il peut au sourire de la jeune femme. "T'as raison la fait pas attendre !" répondit-il presque gaiement, la suivant du regard, alors qu'elle quittait les vestiaires. "A demain..." murmura t-il pour lui seul. Voilà. Il était seul. Leur aventure était oubliée et ils ne seraient plus que des amis. Mais c'était pour le mieux, c'était la meilleure chose à faire. C'était l'unique chose à faire. Pourtant, ça n'empêcha pas Tyler d'attraper la porte d'un des casiers qui était ouverte et de la fermer avec violence, sous le coup de la colère. Après avoir soufflé quelques secondes pour se calmer, il rentra chez lui, appréhendant déjà sa prochaine garde.
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