YESTERDAY'S NEWS |48
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La secrétaire de l'accueil qui lui fait face est au téléphone depuis une bonne minute. Une minute de trop à faire attendre Morena. Car si, les premiers instants, la brune croyait que l'employée réglait un appel professionnel, elle a rapidement compris qu'en réalité, l'autre jeune femme était occupée à raconter son weekend de folie à son interlocuteur. De l'autre côté du bureau, Morena la dévisage, impassible, ses ongles tapotant en cadence sur le comptoir en bois. Elle admirerait presque l'absence totale d'éthique professionnelle de sa vis-à-vis. Quand d'autres se tuent à la tâche pour garder leur travail, elle, cette rousse probablement aspirante actrice qui ne percera jamais, au vernis impeccable et aux cernes trahissant l'abus de nuits blanches, s'en moquent. Se croit intouchable. Probablement couche-t-elle avec l'un des associés. Elle l'observe plus attentivement, zieutant vers l'un des bureaux à la porte fermée anonyme. Oui, ça doit être ça. La maîtresse du patron imagine qu'elle a acquis une sorte d'immunité. Cette petite devinette lui arrache un sourire, quand soudain, elle se penche et arrache le combiné de l'oreille de la secrétaire et le repose sur son socle. Sans préavis. « Hey ! J'étais ... » « ... En pleine conversation personnelle durant vos heures de travail, j'ai bien compris. J'ai rendez-vous avec Maître Wheeler. » la coupe-t-elle posément, son éternel sourire accroché aux lèvres. « Vous êtes ? » soupire finalement la rousse en en revenant à son ordinateur et certainement, à l'agenda . « Madame Zamora. » L'employée reprend le téléphone. « Je le préviens que vous êtes arrivée. » Un instant de silence où la sonnerie retentit à l'autre bout du fil. Où Morena refuse de bouger. « Maître Wheeler, votre rendez-vous de dix-sept heures est ici. Oui. D'accord. » Elle raccroche. « Il va vous recevoir dans un instant. Veuillez patienter. » La brune acquiesce. Encore une fois, elle a gagné.
Mais s'en sortira-t-elle concernant l'affaire qui l'amène dans ce cabinet d'avocats huppé de Los Angeles ? Cela devait arriver, pourtant. Sur tous les salariés mis à la porte grâce à elle - ou à cause, tout dépend du point de vue -, de tout ceux ayant fini par rendre les armes et à avoir claqué la porte de leur entreprise, il fallait bien que ce jour vienne. Celui où malgré la pression, en dépit du rouleau-compresseur Zamora, l'un d'eux n'en sortirait pas suffisamment brisé pour réclamer justice. Eliott Garving était son premier « échec », un petit informaticien ventripotent et imbu de lui-même qu'elle avait toutefois démonté pièces par pièces. L'une d'elles avait dû résister à l'assaut. De fait, il attaquait son ex-employeur en justice pour harcèlement moral et licenciement abusif, entre autres joyeusetés. Et Morena également. Un léger soupir ennuyé lui échappa du siège où elle s'était assise en attendant que son rendez-vous daigne se présenter. Sous sa jupe de tailleur d'un rouge profond, ses longues jambes chaussées d'escarpins argentés s'étaient croisées. Elle avait tellement mieux à faire, tant d'autres clients qui l'attendaient ... Elle réajusta la soie de son top crème au décolleté en dentelles. Juste un mauvais moment à passer.
Puis, elle entendit son nom et redressa la tête. La silhouette qui l'avait interpelé et venait à sa rencontre était loin de celle du vieux beau richissime et prétentieux qu'elle avait imaginé. Aussi ses joues récupèrent-elles leur sourire et se lève-t-elle afin de serrer la main qu'il lui tend. « Enchantée, Maître Wheeler. » Absolument enchantée, à vrai dire. Finalement, peut-être la prochaine heure s'avèrerait-elle plus intéressante que prévue.
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Une affaire. Oui, une de plus. Ceci dit, cela ne me dérangeait pas puisque j’aimais mon boulot alors je n’allais pas m’en plaindre. J’avais une nouvelle affaire à régler pour le coup. Une plainte avait été déposée contre une personne. Celle-ci avait fait appel à moi comme avocat. Je ne la connaissais pas mais, en même temps, je ne connaissais que rarement, voire pas du tout mes clients avant. Je savais aussi que je me faisais un nom petit à petit et on finissait par me connaître. Le bouche à oreille était ce qui fonctionnait le mieux je crois bien. En tout cas pour se faire connaître. J’avais donc rendez-vous avec ma cliente pour aujourd’hui. Je ne l’avais jamais rencontrée et il fallait que l’on mette au point certaines choses. Nous ne pouvions pas aller à un procès sans même se rencontrer. Je lui avais donc donné un rendez-vous. L’heure était finalement arrivée. Je terminais avec mon rendez-vous actuel avant d’accueillir la jeune femme. « Mademoiselle Morena. » Je lui disais avant de lui tendre la main. Je la laissais donc entré dans mon bureau. « Allez y installez vous. » Je lui indiquais le fauteuil qui se trouvait face à mon bureau. Je m’installais de nouveau au mien avant de récupérer le dossier concernant la jeune femme. Je jetais un coup d’œil à l’intérieur, me remémorant l’affaire. « Bien, je vous ai demandé de venir pour que l’on discute un peu avant le procès. Une plainte a été déposée contre vous à cause d'harcèlement et licensiement si je ne me trompe pas. » Du moins, il y avait eu deux plaintes apparemment mais pour la même chose, et la même personne. Je décidais de laisser parler ma cliente un moment. Après tout, la plainte était contre elle et il fallait avant tout qu’elle me raconte sa version. « Qu’avez-vous à me dire ? » Je lui demandais donc.
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Morena fut aussitôt assaillie par la distance professionnelle que l'avocat mit entre eux. Tel qu'il était, tel qu'elle le voyait - certainement à l'image de beaucoup d'autres femmes -, nul doute qu'il était habitué à ce que ces clientes lui renvoient ce genre de sourire ravi. Elle ne s'en offusqua pas. Elle n'avait pas la prétention d'être l'unique parmi une multitude, ni l'envie de se démarquer. Elle était et en ce sens, c'était déjà bien suffisant. Son nouveau compagnon d'infortune risquait de l'apprendre à ses dépends. « Que la vie est terriblement injuste et que Monsieur Garving en a fait l'expérience ? » rétorqua-t-elle avec malice, sourire à l'appui, alors que ses mains s'étaient jointes sur ses genoux croisés. L'image même de la nonchalance, peu étudiée, pour le coup. Cette plainte ne l'inquiétait pas le moins du monde. Si l'avocat était moitié moins doué que le PDG de la boîte le lui avait assuré, les accusations seraient balayées en un seul plaidoyer devant le juge. Si l'imbécile n'avait pas abandonné sa plainte avant. « Soyons clairs, Maître : je n'étais que le prestataire embauché pour faire valoir les intérêts de l'entreprise auprès de ses salariés. Je n'ai rien à me reproche sinon d'avoir été compétente. . » reprit-elle avec la même assurance désinvolte tandis que son regard embrassait les lieux, curieux. « De plus, il n'a pas été licencié mais a fini par démissionner en son âme et conscience. Bien que je ne nierai pas devant vous ne pas l'y avoir quelque peu ... Poussé. » Ni honte, ni regret. Elle semblait plutôt fière à vrai dire. Et pourquoi ne l'aurait-elle pas été ? Après tout, elle n'avait fait que répondre à la demande du patronat, n'en déplaise à la bienséance.
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